Les maisons du Lauragais

 

Un territoire, trois types d'habitat

Le territoire du Lauragais s’étend des portes de Toulouse à celles de Carcassonne, englobant, en partie du moins, les reliefs qui en marquent les limites. Il s’agit donc d’une entité cohérente sur le plan paysager et culturel. Ce territoire n’en est pas pour autant uniforme : le relief et le climat y présentent des caractéristiques différentes selon que l’on se trouve au nord ou au sud, à l’est ou à l’ouest. Au fil des siècles, les hommes n’ont pas vécu de la même façon à Castelnaudary qu’à Lanta, et de ce fait, l’empreinte qu’ils ont marquée dans le paysage d’aujourd’hui n’est pas la même. Les variations dans les différents types d’habitat en sont l’un des témoins les plus flagrants. C’est pourquoi il convient de parler des maisons, au pluriel, du Lauragais.



Les maisons à encorbellement
de Sorèze (81) sont remarquables

Les différents types d'habitat peuvent être considérés selon leur implantation géographique ; les matériaux de construction disponibles, tout comme l'usage des habitations (lié à l'activité de leurs habitants) sont deux critères essentiels influant sur l'architecture. L'habitat présente des particularités parfois minimes (proportions des ouvertures, agencement des ornements), parfois flagrantes (matériau principal de construction). Ce sont ces différences que nous allons détailler, non sans avoir précisé que, d’un paysage à l’autre, les maisons du Lauragais appartiennent néanmoins au même territoire, et que, de ce fait, elles présentent un "air de famille" qui contribue au charme de cette région, et témoigne de son identité longuement forgée au fil des âges.


Maisons des villes, maisons des champs

Le Lauragais est constitué de zones géologiques étroitement imbriquées, mais très facilement identifiables.

Le sillon lauragais est une large plaine s’étendant de Toulouse à Carcassonne ; les grands axes de circulation y sont rassemblés, y compris le Canal du Midi.
Les coteaux sud sont formés de collines cultivées. Les villages resserrés, souvent en position dominante, et les fermes isolées sur les crêtes offrent généralement une superbe vue sur les Pyrénées. Les coteaux nord présentent un paysage similaire, quoi que le relief y soit moins accidenté. Les villages y sont plus nombreux, contrairement aux espaces boisés.

Au sud-est, dans l’Aude, on trouve les collines de la Piège ; le sol est peu fertile, et les grandes cultures laissent place aux prairies de petite superficie, aux forêts et aux landes. L’habitat y est très dispersé.

Enfin, aux confins de l’Aude, du Tarn et de la Haute-Garonne, les premiers contreforts de la Montagne Noire présentent une rupture très nette avec le reste du Lauragais. On se trouve ici dans un paysage typique de moyenne montagne, où l’agriculture est fondée sur l’élevage.

Cette diversité de paysages pourrait laisser croire que l’habitat présente des différences très marquées. En réalité, si les maisons de la Mon-tagne Noire sont bien différentes de celles bordant le Canal du Midi près de Toulouse, la transition entre ces deux secteurs relativement éloignés est très progressive, et ne permet pas de tracer une frontière nette entre différents types architecturaux locaux.

On peut distinguer trois grands types d’habitat, dont les traits propres sont liés à l’urbanisme (villages, habitat rural, bastides), aux matériaux disponibles (et donc à la géologie) et au climat. Ces trois grands facteurs interagissent selon des proportions variables.
Dans un prochain numéro de Couleur Lauragais, nous aborderons l’origine géologique des différents matériaux de constructions.


On peut admirer de très belles maisons "de ville" dans les quartiers anciens de Castelnaudary (11)


Maisons de village et habitat isolé


La différenciation entre maison de village et habitat isolé est essentielle : dans le premier cas, on se trouve face à une architecture verticale, et où chaque maison constitue un élément appartenant à un ensemble plus vaste. Le cas particulier des bastides (le Lauragais en compte une vingtaine, dont Revel, Villefranche…) n’entre pas véritablement en ligne de compte, les caractéristiques architecturales étant liées non aux habitations elles-mêmes, mais à l’organisation de la cité. En effet, les bastides sont des villes bâties au XVIIIe siècle dans un seul but, faciliter les échanges commerciaux par une architecture urbaine fonctionnelle : une halle couverte occupe une vaste place centrale, autour de laquelle sont organisées les rues selon un plan en damier.

Les maisons isolées, dans la plupart des cas, étaient à destination agricole ; ce sont les "bordes", aujourd’hui souvent détournées de leur usage premier pour être transformées en maisons d’habitation. Il s’agit ici d’architecture horizontale, où la nature du terrain et la force du vent sont déterminants pour le choix de l’implantation du bâtiment.

Les maisons de village sont souvent étroites (deux travées, parfois quatre), sur deux ou trois niveaux surmontés par les combles.
Les ouvertures du rez-de-chaussée, et notamment le portail, sont percées selon une tradition architecturale qui constitue, à n’en pas douter, la clé identitaire de l’architecture lauragaise : la voûte en plein cintre. Quant aux greniers, ils sont éclairés et ventilés grâce à des fenestrons (localement, on prononce "fenestrou") de formes variables. Dans tout le Lauragais, la plupart des maisons traditionnelles présentent ces deux caractères qui permettent de les identifier presque à coup sûr.

C’est sur les places centrales des bastides que l’unité architecturale entre les constructions mitoyennes est la plus flagrante : la présence d’arcades ininterrompues ou de couverts continus offre une unité visuelle liant chaque maison.

Les fermes lauragaises sont bâties selon un plan pratiquement immuable : appelées "lauragaises", "bordes" ou encore "métairies", il s’agit de longs bâtiments, orientés de manière à offrir le moins de résistance possible aux vents dominants. Lorsqu’il est question de construire une extension, celle-ci vient prendre place dans le prolongement du corps de ferme, et le pignon exposé au vent reste toujours aveugle. Ici, peu de fermes en "L", et encore moins en "U" ! Les bordes sont longues et basses ; elles comptent rarement plus d’un niveau (le premier étage, utilisé aujourd’hui comme habitation, était généralement un espace de stockage pour le fourrage). Les constructions annexes, au premier rang desquelles on trouve les pigeonniers et les moulins, se trouvaient à proximité du bâtiment principal. Souvent construites au sommet des collines (là où le terrain est le moins fertile), les fermes lauragaises sont généralement entourées de bosquets d’arbres dont les fonctions sont multiples : fourniture de bois et de fruits, protection contre le vent et le soleil…


Sur les berges de l'Hers Vif, les murs de Calmont (31) ont été bâtis avec des rangées de galets et de briques


Brique ou pierre ?

Au cœur d’un bourg ou au sommet d’une crête, l’architecture générale des maisons lauragaises ne varie pas vraiment, où que l’on se trouve sur le territoire. En revanche, selon les zones du Lauragais, les matériaux mis en œuvre dans la contruction des bâtiments sont extrêmement différents : brique à l’ouest, là où le sol est argileux, et pierre à l’est, quand on se rapproche des carrières. Entre ces deux extrêmes, les deux matériaux se mêlent à des degrés divers. Près des cours d’eau, les galets entrent également dans la composition des murs. Quant au bois, sa présence est remarquable sur les façades des maisons les plus anciennes, où il était mis en œuvre pour des colombages (dont on a de beaux exemples à Saint-Félix) ou lors de l’édification des arcades ceignant les places des bastides.
La brique traditionnelle du Lauragais porte le nom de "foraine" ; de grandes dimensions (40 x 30 x 5 cm), elle entre dans la construction des bâtiments les plus divers, du modeste pigeonnier à la monumentale église. Selon la provenance de l’argile, la couleur présente quelques variations, du rouge brun à l’orangé. Pour les parties secondaires de la maçonnerie, des briques de qualité moindre étaient utilisées. Généralement couvertes d’un enduit protecteur, les briques n’étaient laissées apparentes que sur les pourtours des ouvertures, créant ainsi un effet décoratif.

Les bâtiments en pierre se trouvent sur les flancs des collines de la Piège et de la Montagne Noire. Qu’elle soit taillée ou simplement dégrossie, la roche affleurant dans le Lauragais n’est pas de très grande qualité ; calcaire, elle n’offre pas une grande résistance à l’érosion. Pour protéger les murs exposés aux intempéries, dans certains villages de la Montagne Noire, l’ardoise est parfois utilisé en parement, sous forme de larges plaques.

Dans la zone intermédiaire entre le pays de la brique et celui de la pierre, les deux matériaux sont utilisés ensemble, selon des agencements qui n’obéissent pas à de véritables règles : parfois, les murs sont composés des deux matériaux pêle-mêle. Il arrive, sur les façades de maisons cossues, que brique, pierre ou galet soient alignés afin de créer des lignes contrastées. Dans une façade de brique, les linteaux, seuils et appuis sont réalisés en pierre taillée…


Le mélange des différents matériaux de construction est courant dans la partie médiane du Lauragais

Les détails qui font toute la différence

Lorsque l’on décide de rénover une habitation ancienne, il est relativement aisé de lui rendre son identité, puisque les matériaux constitutifs sont toujours présents. En revanche, lors de la construction d’une habitation neuve, alors que les techniques et les matières premières ne présentent plus aucun lien avec la tradition locale, comment faire pour lui conférer un petit air du pays ? Un bon compromis consiste à utiliser, à des fins d’ornement, des éléments caractéristiques de l’architecture locale.
S’il est désormais hors de question de bâtir toute une maison à l’aide de briques foraines, il est toujours possible de les utiliser pour réaliser les encadrements de portes et de fenêtres. Des briques de parement sont commercialisées à cette fin, et il est même possible d’utiliser des encadrements préfabriqués, fort peu tra-ditionnels, mais qui font parfaitement illusion. Les matériaux de récupération (pierres, briques, linteaux en bois…) peuvent également être utilisés.

Fenestrons, génoises (alignements sur deux ou trois rangs de fragments de tuiles, juste sous les toits, formant une jonction entre la rive et le mur) et corniches rythmant les façades dans leur longueur peuvent très facilement être intégrés à une construction neuve, lui donnant instantanément un cachet authentique.


Différents types de fenestrons
que l'on appelle aussi des "occuli"

 
 

Des ouvertures verticales, des fenêtres à huit carreaux, des volets de bois peints de couleurs sombres ou neutres permettent d’intégrer efficacement la construction dans son environnement.

La toiture est un élément essentiel de l’esthétique d’une construction ; dans le Lauragais, les toits sont à deux pentes relativement peu inclinées, et systématiquement couvertes de tuiles canal.
La silhouette générale de la maison est également déterminante. Le style "méridional", aujourd’hui très répandu dans toutes les régions françaises, présentant des toitures sur plusieurs niveaux et des décrochements de façades, ne correspond pas à l’identité architecturale du Lauragais. Pour donner à une maison neuve une apparence parfaitement intégrée à l’environnement, rien ne vaut une construction en longueur, sobre, couverte d’un toit d’un seul tenant.
De telles maisons, réalisées à l’aide de techniques et de matériaux de dernière génération pour plus de confort, mais respectant l’identité architecturale du Lauragais, sont nombreuses dans les nouveaux quartiers résidentiels qui surgissent à proximité des villages. Les artisans locaux connaissent bien tous ces petits détails qui transforment une simple maison en une véritable habitation lauragaise. Il suffit de leur demander conseil et de faire confiance à leur expérience pour obtenir un résultat esthétique sans faire de concessions à la modernité. Tout cela, bien sûr, sans renoncer pour autant à ses propres envies, ni à sa propre culture si l’on vient d’une autre région… La maison doit avant tout plaire à ceux qui l’habitent, et tout patrimoine s’enrichit, aujourd’hui comme hier, des apports successifs des nouveaux arrivants.

Dominique BARDEL
Crédit photos : Couleur Média

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